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Crise ouverte, la FNSEA écartelée entre éleveurs et céréaliers

28 Mars 2009 , Rédigé par jr Publié dans #actualité agricole

Le congrès de Poitiers du 31 mars au 2 avril s'annonce houleux. Les grandes cultures font tanguer le premier syndicat agricole français. On se déchire à propos des aides européennes.

Ils sont « désespérés », « écoeurés ». Touche pas à mon blé. La révolte gronde dans les riches plaines du Bassin parisien. Mercredi à Paris, 5000 agriculteurs ont défilé contre la réforme des aides européennes. Dès 2010, les producteurs de grandes cultures devront partager leurs aides avec les filières les plus fragiles. Et ça ne passe pas.

Car cette défaite, les grands céréaliers n'y croyaient pas. Jamais, pensaient-ils, le ministre n'osera. Michel Barnier a pourtant tranché. Au nom de la justice.

Histoire d'un casse réussi. Monté dans l'ombre par Pierre Chevalier, le président de la Fédération nationale bovine. L'homme revient de Bruxelles. Avec le sourire. « La Commission nous soutient, glisse-t-il au téléphone. Mais c'est vrai, ça a été très dur. J'ai pris des coups. » Mieux répartir les aides européennes. Depuis longtemps, l'éleveur corrézien en parlait. Sans réussir à se faire entendre. Échec cuisant l'an dernier, lors du congrès de la FNSEA à Nantes.

Inégalités

Bien décidé à faire bouger les lignes, Pierre Chevalier a mûri sa contre offensive. « On ne nous prenait pas au sérieux. J'ai fait plancher des économistes», ajoute-t-il. En pointant du doigt les inégalités de revenus à l'intérieur même du monde agricole: 30000 € en moyenne de revenu par an pour un céréalier en 2008, 14100 € pour un éleveur de bovins. Moins encore : pour les maraîchers : 8570 €.

Cherchez l'erreur. Lorsque le cours des céréales a doublé, jamais les céréaliers n'ont proposé de partager. Aujourd'hui, il payent le prix fort. Et laissent au président de la FNSEA le soin d'éteindre l'incendie. Un crève-coeur pour Jean-Michel Lemétayer. Comme mercredi lors du congrès des producteurs de lait au Mans. Alors qu'il plaidait l'avenir de la filière laitière, les céréaliers défilaient à la même heure à Paris.

C'est ce qui s'appelle un coup de poignard dans le dos. « Les manifestants ont dénoncé la politique du ministre, pas celle la FNSEA », dit-il pour se rassurer. « À voir », analyse Stéphane Le Foll, député européen et spécialiste des questions agricoles au PS. « Ce virage pris à reculons n'a pu se faire sans l'aval de la direction de la FNSEA. D'ailleurs, cette réforme était nécessaire. » Jean-Michel Lémétayer le sait bien, lui aussi. Mais préfère aujourd'hui ne pas en parler. Conscient de l'ampleur de la crise qui secoue le premier syndicat agricole français.

320 000 adhérents

En dépit de ses 320 000 adhérents et de ses 20 000 élus, la Fnsea est un colosse aux pieds d'argile. Un syndicat contraint de s'adapter dans l'urgence. Pour répondre au défi d'une agriculture à la fois productive et respectueuse de l'environnement. Mais aussi affronter la remise à plat de la politique agricole européenne. « La FNSEA a géré de façon conservatrice des acquis. L'agriculture sera au coeur de la prochaine législature européenne, analyse Stéphane Le Foll. Pour justifier des aides, un projet agricole sera indispensable. »

Mais c'est un sacré défi. Car l'agriculture n'échappe pas au repli sur soi. À la remise en question des institutions. Chacun en veut pour son argent. « Je n'ose croire que pour certains, le syndicalisme puisse se résumer à des aides Pac », insiste Jean-Michel Lemétayer qui ne veut pas croire à une scission. Pour gagner la bataille de Poitiers, le supporter du Stade Rennais parie sur le collectif. Quitte à jouer les prolongations. « S'il faut débattre jusqu'à une heure du matin, on le fera. »

Patrice MOYON.

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